ne parle plus de créateur, on parle de principe créateur, jolie pirouette pour parler de quelque chose d'indéfinissable, que l'on prenne bien garde de définir pour ne froisser personne. Le terme de « principe » n'est bien sur pas innocent. Abstraire , c'est rendre moins présent, flou, et donc, c'est préserver à chacun l'échappatoire de l'interprétation. Ce qui ,d'ailleurs, est un recours assez courant dans la rhétorique maçonnique, en particulier quant aux symboles : en effet, sous prétexte que chacun interprète comme il l'entend un symbole, il est quasi impossible de dégager quelques principes directeurs... N'est-ce pas, comme pour le sujet qui nous intéresse, une sorte d'agnosticisme intellectuel, consistant à ne pas sembler s'engager pour une conception ? Ne faudrait-il pas, pour revenir à notre sujet, s'interroger sérieusement sur nos conceptions profondes en matière de foi, d'agnosticisme en particulier. Beaucoup de maçons se déclarent agnostiques tout en faisant référence au grand architecte de l'univers. Si l'on s'en tient à la définition étymologique de ce terme, à savoir que l'agnosticisme est une attitude tendant à considérer comme vaine tout doctrine métaphysique et qui déclare inaccessible à la connaissance toute réalité qui dépasse les apparences sensibles3, alors la contradiction est flagrante ! Le travail maçonnique est , par définition, une longue interrogation métaphysique.... L'athéisme, quant à lui, simple non-croyance, trouve tout à fait sa place en loge. Peut-être faut-il alors concevoir l'agnosticisme dans l'acception populaire du terme, c'est-à-dire la tendance à la défiance vis-à-vis des églises instituées. Car enfin, un maçon peut-il être réellement agnostique ? Peut-il considérer alors l'image du grand Architecte de l'univers comme une simple et pure allégorie, sorte de représentation abstraite, caméléon  qui changerait de sens selon celui qui le regarde, suivant le lieu et le temps où on l'observe ? Assurément, non. Il est donc nécessaire d'abandonner le discours habituel consistant à dire que le symbole est un outil, multiple, malléable qui s'adapte aux époques et aux peuple, sinon nous n'arriverons jamais à construire de solides fondations à notre édifice.
Ne serait-il pas plus censé de considérer le symbole comme un et unique, universel , représentation abstraite dans le monde incréé d'un seul objet dans le monde créé ? Et à cette définition, le grand architecte de  l'univers doit pouvoir, lui aussi, supporter l'attribution d'un seul et même concept abstrait. Mais avant tout, par quoi se manifeste donc l'éventuel concept auquel correspondrait le grand architecte ? Tout d'abord, dans les loges, c'est lui qui préside au point le plus haut, sous la voûte céleste et étoilée, au coeur du delta lumineux, au centre d'un « mag'n David » (ou bouclier de David) pour certains martinistes4. L'agnostique n'y voit que l'œil de la conscience profonde de l'homme, qui aide l'homme à veiller à  ne pas quitter son chemin de droiture. Ce même oeil auquel Caïn voulait échapper et qui le fit mettre une pierre derrière lui pour ne plus voir la vérité ; hélas « l'œil était dans la tombe et regardait Caïn »4. Ce grand Architecte intérieur, intime de l'individu, est sa gouverne, tout comme la lanterne de l'ermite du tarot de Marseille qu'il porte devant, pour éclairer le chemin qui reste à parcourir de la lumière de la conscience qui fera le jour sur les ombres au loin et permettra à l'ermite de discerner le bien du mal, le bon du mauvais, le juste de l'injuste.
On voit aussi fréquemment le Grand Architecte représenté comme un vieil homme, courbé vers le monde à ses pieds, avec en main droite , un compas ouvert, pointes vers le bas. Ici, bien sûr, plus question de conscience, mais d'architecture, de construction, le compas symbolisant l'axe polaire, le centre autour duquel gravitent les constellations, mesure suprême du grand architecte de l'univers, point originel duquel tout est parti et autour duquel tout s'organise circulairement. De ce point de vue, le grand architecte ne serait donc que , et c'est déjà beaucoup j'en conviens, le départ de toutes choses créée. Mais il est impossible de limiter le grand architecte à ce rôle, sinon que répondre aux matérialiste quand ils poseront la question de savoir ce qui se passera le jour où la science saura expliquer l'univers dans son ensemble ainsi que l'origine de  cet univers ? Rien, probablement si l'on parvient à répondre à la question « et avant ? ». 
Il faut peut-être se servir d'une autre expression qui rend peut-être mieux compte de la notion dans son ensemble et qui est celle de grand horloger de l'univers. Intervient ici un nouvel élément : le temps. Et les conceptions associant le temps au créateur sont nombreuses et fort anciennes : le grand architecte, créateur de toutes choses, serait plus que le simple créateur du temps, il serait le temps lui-même puisque mesure de tout. Nous trouvons cette idée chez Cristias (neveu de Solon et parent de Platon) qui parle « du chef d'oeuvre du temps, architecte savant
[ ... ] qui fonde au mieux l'idée de divinité »5. Nous la retrouvons développée chez Heidegger qui démontre que le temps est le vecteur de l'être. « Dans la religion de Zarathoustra , il est révélé qu'à l'excipient du temps, tout le reste est créature, tandis que le temps, lui est créateur »5. Si effectivement, l'existence semble être dépendante du temps, le problème de celui qui crée ou qui est le temps reste entier. Peut-on le connaître ce grand architecte, c'est à dire peut-on définir ses attributs (théisme) ou pas (déisme) ? La philosophie grecque et la Bible définissent cet horloger d'au moins trois façons qui peuvent nous servir de base à l'interprétation que nous pouvons en faire à l'époque contemporaine :

  • soit comme l'ensemble des lois physico-chimiques inhérentes à ce que on appelle la nature vivante ;

  • soit comme l'ensemble des diverses modalités de véritable recréation que la Bible appelle la résurrection des morts ;

  • soit comme les causes respectives des vingt-quatre vertus ('elohim) dont la symbolique stellaire, composée du zodiaque et de douze constellations arctiques se trouve décrite dans Gen. 1-4

Trois façons, en somme de concevoir le grand architecte de l'univers : soit comme un simple vecteur de la vie et de l'être, moteur de la nature, de la création et des hommes. Le grand architecte serait selon cette explication cette sorte de force diffuse qui règne partout dans l'univers et dont nous faisons partie, ce fluide  ou

(Suite page 18)

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