ÉGYPTE
ÉLUS COËNS
EMPIRE ESPAGNOL
EMPIRE NAPOLÉONIEN
ÉGYPTE
Tout l'Occident, depuis Athènes, s'est engoué de l'Egypte. Égyptologie ou égyptomanie ? Le dilemme est irréductible. Il faut le surmonter avec l'égyptosophie. L'égyptosophie embrasse l'Egypte pharaonique; le christianisme accepté dès la première génération par des cercles juifs d'Alexandrie, qui coexistaient avec d`autres cercles, très fermés, mainteneurs de la tradition hiératique; les gnosticismes nés dans les mêmes cercles juifs la bibliothèque de la ville en ses périodes hellénistique philonienne catéchétique (Clément, Origène...); Hermès, plus égyptien qu'on n'a voulu l'admettre, dont la traduction par Marsile Ficin, à la Renaissance, lança l'égyptomanie, avant l'égyptologie, démythologisante jusqu'à la profanation mais aussi l'égyptosophie dont Athanase Kircher fut un précurseur les coptes enfin, qui conservent une partie de la connaissance qu'avaient les prêtres de Kémit des lois du monde et de la nature.
La théologie de l'Égypte est l'histoire du cosmos (Varille). Chez « les plus religieux des hommes »(Hérodote), Pythagore apprit les rapports de l'espace et des angles avec la conscience humaine. L'harmonie est l'idéal et pour conserver ou rétablir la perfection initiale, le temple* abrite « une centrale énergétique » (Serge Sauneron); les prêtres y opèrent avec les énergies divines offertes. Leur secret* est celui de l'énergie liée aux ondes de forme et l'énergie vibratoire est à la base du principe de la vie, principe cosmique universel, transcendant et immanent. Maat est la présence divine, la Sagesse Logos en grec, Shekhinah en hébreu. Les magiciens coptes recourent à la magie pharaonique et les prêtres coptes rejoignent la tradition salomonienne. Les hiéroglyphes cachent et découvrent. Lus comme des écritures modernes, les textes ne révèlent rien de la science ésotérique des Anciens, des anciens Égyptiens comme des anciens Hébreux. Sous les fables et les images, Kircher acquérait déjà cette connaissance de la Divinité et de sa création gui fait la sagesse hiéroglyphique des Égyptiens. L' architecture est symbolique comme l'écriture. Une méthode rigoureuse décrite par le mythe et la philosophie symbolique permet (René Schwaller de Lubicz l'a montré) de trouver et d'enseigner la sagesse religieuse et scientifique.
Méta-historiquement, oui; historiquement non, la franc-maçonnerie n'a pas son origine dans l'ancienne Égypte.
Il est pourtant commode et relativement vrai de donner, selon l'expression de Galiffe (1852), à « cette chaîne mystérieuse qui paraît s'étendre sur tous les temps et sur tous les pays du globe » le nom de franc-maçonnerie*: la franc-maçonnerie, au sens restreint, est. en effet, une confrérie* religieuse d'initiation; et l'initiation* maçonnique, avec son universalité et ses caractères spécifiques, porte sur la science de l'homme dans ses rapports avec Dieu et avec l'univers. D'autre part et toutes réserves faites sur les lacunes de la tradition pharaonique seule, les Anciens Devoirs instruisent les maçons manuels que les Hébreux apprirent en exil la science des Égyptiens et que cette science permit à David et à Salomon de bâtir le Temple. Anderson* reprend: les Israélites, lors de l'Exode, « étaient tous un royaume de maçons ».
La sagesse maçonnique et la sagesse égyptienne sont de la même sorte religion et science, la méthode symbolique leur est commune. Chez les fondateurs de la franc-maçonnerie moderne, la révélation primitive réformée en noachisme s'identifie à la prisca theologia codifiée par la philosophie occulte de la Renaissance, où Platon, Zoroastre et Moïse accompagnent Jésus-Christ, sous la baguette d'Hermès-Thôt.
Ni les peu connus Voyages de Cyrus en 1727, du fameux chevalier André-Michel de Ramsay*, ni le fameux roman Sethos (1731) du peu connu abbé Jean Terrasson ne transposent aucun rite maçonnique passé, présent ou futur. L'un et l'autre ouvrages ont, pourtant, encouragé la maçonnerie égyptienne en gestation et l'ont inspirée sur plus d'un point d'histoire légendaire ou de symbolisme, voire d'égyptosophie.
Crata Repoa (serait-ce la tête penchée en grec de cuisine ?), par K. F. Köppen et J.W.B. von Hymmen, en 1770, ou Initiation aux anciens mystères des prêtres d'Égypte dépasse-t-il les bornes d'un roman ? Il ne le semble pas, quoique sa fortune fût grande et influente mais guère dans le détail. La traduction française date de 1821 par Antoine Bailleur, Ragon aidant. L'Ordre des Architectes Africains, c'est-à-dire égyptiens, de t 767, en sept grades*, dont Crata Repoa serait, en quelque sorte le manuel, souffre d'une grande obscurité, qui ne cache peut être pas grand-chose. Toutefois, la patente à J. F. Kuhn d'un prince prussien qui rappelle Frédéric-Guillaume laisserait croire à quelque chose. Restent les éléments égyptosophiques d'« un système métaphysique élaboré, une sorte de cabale cérémonielle» (M. P. Hall).
Obscurs aussi - mais ont-iLs pris corps ? -, les liens de Cagliostro* à Naples avec l'hermétiste Raimondo di Sangro*, et son dépôt cérémoniel des Arcuna Arcariorum. Mais la Haute Maçonnerie égyptienne sous-tend son égyptosophie d'une histoire documentée. Première loge à La Haye en 1778, c'est une loge d'adoption* peut-être souchée sur une Loge masculine. Des loges fonctionnent à Mitau (une loge mixte ou une loge d'adoption), Varsovie, Strasbourg en 1780. Le rite s'organise à Lyon où est installée le 24 décembre 1784, La Sagesse Triomphante. Puis c'est Paris! un échec à Londres, une reprise à Bâle et la nouvelle folie romaine de se dévoiler.
La Haute Maçonnerie égyptienne paraît aux observateurs légers indûment nommée mais elle manifeste sa nature égyptosophique. Comment ? Dans son nom, en effet, ce qui n'est pas peu, et dans le titre du Grand Copte (qui n'est d'ailleurs pas l'auteur de la Sainte Trinosophie). Puis sa pratique rituelle et personnelle épouse la ligne de l'Égypte pharaonique relayée par le christianisme copte. La prisca theologia sous jacente permet au qualificatif « égyptien » de signifier que la Haute Maçonnerie du Grand Copte n'est pas chrétienne en un sens sectaire mais chrétienne oecuméniquement. Dans l'histoire et dans la méta-histoire, sinon par une filiation rituelle, le savoir exposé de Cagliostro fournit aux Rites Égyptiens* qui suivirent le meilleur de leur enseignement: théurgie, magie religieuse, travail d'immortalité; La clairvoyance enfin, qui, au carrefour de la psychologie, du langage et de la religion, bénéficiait, dans l'Egypte des pharaons où les coptes demeurent, d'un statut commun à toutes les sociétés traditionnelles et, pour ainsi dire récapitulatif. Tous les Rites Égyptiens, soucieux de justifier ieur réclamation, disposent ainsi du moyen que le Grand Copte mettait au service de son grand dessein: arracher la franc-maçonnerie à un athéisme de fait et rendre l'Église catholique romaine à son active vérité.
Une brassée de petits Rites Égyptiens: Les Parfaits Initiés d'Égypte dirigés, peut être fondés par Aliette-Etteilla, à qui succéda, « grand mage », Geille en 1791 Les Amis du Désert, à Toulouse et à Auch, en 1806, fondés par Alexandre Du Mège, en quatre grades égyptianisants. Chefdebien allègue le Rite Oriental, ou Rite Mage vraiment asiatique, gouverné en 1807 par l'abbé Alès de Bermont d'Anduze. Le baron de Tschoudy (1724-1769) a été crédité de rituels apocryphes plus alchimistes qu'égyptiens, qui n'ont peut-être jamais été pratiqués, et d'un Ordre des Philosophes Inconnus dont il s'est contenté de publier les statuts et le catéchisme. L'Ordre sacré des Sophisiens, trois hauts grades*, en 1801, n'est attesté que par Ragon. Enfin, le Rite de Memphis, douteux en 1814 ou 1815, certain en 1838. Ses liens avec les Philadelphes de Narbonne, installés là en famille, le 27 novembre 1779, apparaissent surtout dans la reprise du titre « Rite Ancien et Primitif » Le Rite de Misraïm était daté de 1815. Il doit être depuis peu remonté à 1811. Milan 1805, reste douteux. L'union de Memphis et de Misraïm, partiellement réussie à Naples en 1881 par Garibaldi *, a été mainte fois défaite et refaite, d'autant plus que les deux rites connurent de nombreuses scissions.
En Égypte ancienne le bâ relie le sensible et l'imaginaire. « Ton rêve est une Égypte », disait Cocteau. Gare à l'inverse !
R. A.
ÉLUS COËNS
Martines de Pasqually* ;a monté peu à peu la structure de son Ordre*, au sein de la franc-maçonnerie afin de lui confier le dépôt du culte primitif. Tous les hommes sont, en effet, destinés à manifester, même ici-bas, quelques rayons des facultés divines, quelques-uns sont appelés à cette ouvre avec une détermination positive et active: ce sont les Élus coëns, ou prêtres choisis. Dix grades* composent cet Ordre des Chevaliers maçons Élus coëns de l'univers, appelés en bref Élus coëns ou coëns. « Le Souverain Juge Réaux est le premier grade de la maçonnerie ensuite le commandeur d'Orient, le chevalier d'Orient, Le grand architecte, le maître, le compagnon et l'apprenti coëns, le maître parfait élu, le maître, compagnon et apprenti bleus. » Ce sont dix noms de grades avec quelques variantes, qui ne sont pas incompatibles: Maître Coên ou Maître Particulier Élu Coën; Grand Architecte ou Grand Maître
Coën; Chevalier d'Orient ou Grand Élu dé Zorobabel, Commandeur d'Orient ou Apprenti Réau-Croix. Les initiales S. J. ou S.I. peuvent aussi suggérer « Supérieur Inconnu », et le mitan du XVIIIe siècle maçon nique a élaboré cette expression en une mythologie luxuriante.
Dix grades, mais ne sont-ils pas onze ? D'emblée, suivons les tours et les détours d'une pensée qui foisonne. Tout en haut
de l'échelle, à moins que ce ne soit au pinacle du temple, mais c'est en réalité dans le saint des saints, le dernier grade ou le premier, septième ou dixième, fait la quatrième classe, s'il ne se situe hors classe: le Réau-Croix, ou Maître Réau-Croix, dit çà et là Réau-Croix et d'Orient. Le Maître Élu, l'Elu, soil ce grade est intégré dans la première ou la deuxième classe et une classe suprême est allouée au Réau-Croix, soit Le Maître Élu emporte une classe deuxième entre le seuil symboLique et un porche triparti, en dépareillant le Réau-Croix, et c'est encore grâce à sa présence que le dénaire, cette fois, serait atteint, autour du centre intact. (Onze grades dans le système, a-t-on cru pouvoir dire: c'est mal calculer, dans l'ignorance de ce que sont les nombres et les grades.) Un autre compte flatte les sept grades supérieurs et les assigne à trois étapes de l'instruction religieuse en sa partie réservée: les Frères du Porche, entraînés par le Maître Élu, étudient la nature divine, spirituelle, humaine et corporelle; ceux du Temple, que le Maître Élu introduit, apprennent la théurgie théorique; enfin le Réau Croix, septième gradé en l'occurrencer pratique le culte théurgique.
On dirait un système écossais* banal. Mais des particularités inquiètent. D'abord, cette maçonnerie se veut la seule maçonnerie authentique. Ensuite, les trois degrés bleus ont leur rituel propre, alors que, jusqu'à l'acclimatation de la réforme allemande en 1772, toutes les loges de France ont pratiqué ces degrés sensiblement de la même manière. Puis, aux plus hauts degrés, les formes maçonniques sont abandonnées. Enfin, et telle est la raison des particularités précédentes, cet Ordre maçonnique constitué par Martines de Pasqually poursuivait un dessein inouï: on y enseignait en symboles, et dès le premier grade, la réintégration des êtres; on y formait des prêtres capables d'officier, d''« opérer » à cette fin. Un seul Ordre soidisant maçonnique présentera une même originalité: la Haute Maçonnerie égyptienne de Cagliostro*.
Adam avait pour tâche de ramener les anges pervers. Depuis sa propre et double prévarication, sa vocation inchangée s'alourdit du soin de se défendre lui même.
L'échelle des grades culmine dans l'ordination au Réau Croix, seul investi de la plénitude du pouvoir sacerdotal. En castillan réal signifie « royal », mais réau signifie « roux » ou « rouge », en mémoire d'Adam et de la rose, et aussi de la croix associée à la rose. Le Réau-Croix n'est le Rose-Croix* maçonnique que par analogie partielle et en modeste allusion partagée à l'état de Rose-Croix. Une référence au symbolisme de la Rose-Croix ne suffit pas à assimiler le Réau-Croix au grade que le futur Rite Écossais Ancien et Accepté* retiendra. Jean-Baptiste Willermoz*, qui unira les deux titres dans une seule signature, assure, au contraire, que le Réau Croix est vraiment « le degré des élus de cette classe, puisqu'on y trouve des preuves évidentes de sa vérité »: du passe-passe. Mais la matière est malléable et si on lit d'ordinaire Chevaliers Maçons et Élus coëns de l'Univers, est-il interdit d'entendre, en concurrence, Chevaliers Maçons Élus et Coëns de l'univers ? Le premier diplôme décerné à Jean-Baptiste Willermoz le 23 mai 1767, écrit bien à quelques, lignes d'intervalle: Chevaliers Maçons Élus Coëns de l'univers et Chevaliers Maçons de l'univers Élus Coëns.
Les statuts de 1767, dont on a cité le début de l'article XII, en ont fixé les modalités même si Martines avait rédigé de nouveaux statuts qui restèrent Lettre morte. Mais les rituels et les instructions n'ont jamais été tout à fait achevés. Il ne semble pas que le père de Martines se soit attaché à articuler, en partie au moins, le double pouvoir maçonnique et sacerdotal qu'il léguerait à son fils et Martines peina à la besogne. D'une part, il répète, sans se lasser, que ce qui lui a été dit, ce qui lui a été enseigné, par ses prédécesseurs, ses amis d'ici-bas, par la Sagesse elle-même garantit le fond. D'autre part, quant à la forme, il se réfère à des originaux, tire des copies d'un registre, mais n'est-ce pas la forme des opérations théurgiques qui est en cause ? Dans l'habillage maçonnique, Martines doit adapter et inventer, sur une mesure impossible à suivre en tous points et insupportable à l'approche du sommet. Dans le manuscrit Baylot*, dit aujourd'hui de Saint-Domingue, entre 1765 et 1767, ce semble, la forme est élémentaire, le fond y est pour l'essentiel.
Il y eut donc des flottements avant 1767, puis des aménagements symboliques dont le nombre des grades a donné une idée.
Martines de Pasqually s'annonce non pas comme le Grand Souverain, mais comme l'un des sept Grands Souverains de l'Ordre, en charge de la partie septentrionale. Il signe des initiales « C. Srin» une lettre à la Grande Loge de France*, en date du 31 août 1764, et, en 1765, un explicit porte « nos grands souverains ». Un Grand Maître Suprême commande aux sept; Martines refusa d ' en révéler plus que l' existence et, au moment où il fallait prier pour sa guérison, la maladie temporaire.
Le sceau de l'Ordre existe en trois versions au moins; Martines a ses griffes, ses manières de signer.
Les femmes* sont admises à égalité dans l'Ordre: Mlle Chevrier, Mme de Lusignan, Mme de Brancas, Mme Prowensal1 la présidente Du Bourg... et, comme il sied, Mme de Pasqually.
L'historiographie maçonnique a de long temps repéré sans s'y arrêter un certain Valmont; grâce à André Kervella (1999} il paraît que Martines l'a rencontré, mais Hauterive le dénonce comme le chef d'un Ordre Noir, des anti coëns, en quelque sorte. Dangereuse piste, à suivre d'autant.
Allons au fond, mais seul y va le vocabulaire des Élus coëns.
L'Ordre, de nature « théocrati-monarchique » est une circonférence particulière, réceptacle des actions spirituelles célestes, où sont admis tous les hommes de désir; chacun est un point, l'esprit divin est le centre. Sept classes ou sept grades y sont figurés par six cercles intérieurs, ou parties, en rapport avec le mont Sinaï divisé en sept et son sommet représentait le sur céleste. l'Ordre en tant que réceptacle s'éclaire en présence du Christ dont le nom signifie « réceptacle d'opération divine » et dont la présence même constitue la chose par excellence, la Chose.
La circonférence particulière que constitue l'Ordre est aussi l' image de la circonférence spirituelle formée par les sept agents principaux planétaires charges de diriger et protéger la création spirituelle. Pour remonter au centre dont il est descendu, l'homme doit payer tribut à chacun des agents principaux. L'entrée en scène des anges n'est pas accidentelle; ils vont l'occuper toute, à bon droit.
Notre travail consiste à nous mettre en rapport avec les êtres spirituels bons qui nous entourent par la force de notre volonté, de notre désir et de notre prière, afin que ces êtres qui sont un aspect du principe divin puissent nous communiquer les influences qu'ils reçoivent et que nous ne pouvons plus recevoir directe ment. L'esprit bon compagnon, notre fidèle guide de pensée, paroles et actions, doit rétablir le contact interrompu. Sa jonction à l'homme s'effectue au baptême, virtuellement il nous reste à actualiser la présence de ce véritable prochain et, nouveau Tobie, la collaboration de ce Raphaël personnel et nécessaire.
Quoique Martines fût un initié dans la haute science de Moïse, le culte des Élus coëns n'est pas le culte juif. Il diffère par là des épisodes propres aux rituels du Sublime Choix (1744, en France, réputé d'origine anglaise) et du deuxième Ordre du Rite Français (1786), où les récipiendaires jouent au service du Temple* de Salomon, aux Grands Écossais de Montpellier qui accomplissent le signe de bénédiction des kohanim, sans prétendre à bénir. Les Élus coëns ne jouent pas comme ces frères-là, ils fonctionnent. Leur office tient à un temple, qui incorpore au troisième de ce nom les traits du quatrième à venir. Les cultes modernes, c'est-à-dire post-diluviens, suivent un ordre hiérarchique: la Chiné, l'Égypte*, Abraham, Moïse, le Temple, le Christ.
Le culte des Élus coëns comprend dix sortes d'opérations, souvent appelées cultes elles-mêmes. Ces cultes sont respectivement dits d'expiation; de grâce particulière et générale; contre les démons; de préservation et de conservation; contre la guerre; d'opposition aux ennemis de la loi divine, pour obtenir la descente de l'esprit divin; d'affermissement de la foi et de persévérance en la vertu spirituelle divine; pour la fixation de l'esprit conciliateur divin avec soi, de la dédicace annuelle de toutes les opérations au Créateur.
Chaque opération met en ouvre des gestes et des mots, des parfums et des dessins, des nombres, des hiéroglyphes et 2 400 noms angéliques secrets. Au sensible répond le sensible. Mais la pensée, la volonté et l'intention de l'opérateur sont divines, car le coën n'est pas un magicien, c'est un prêtre. La réponse ne dépend pas de l'homme seul, encore moins du grand souverain: elle dépend de Dieu et les anges n'ont d'utilité que de donner, Dieu voulant, accès à la Chose. Saint Martin*, toutefois, s'effraya du mixte.
La structure de l'Ordre en trois ou quatre classes, et en dix grades, on l'a vu, s'ordonne à son but.
Pour successeur Martines avait désigné Armand-Robert Caignet de Lester, ou Lestère (1774-1778}; après lui, Sébastien de Las Casas (1778-1781) fut contesté par Willermoz et ses amis, ainsi que par Jean Jacques Du Roy d'Hauterive. Celui-ci se comporta en Grand Souverain, sans en arborer le titre.
Assoupi en 1807, en sommeil peu après l'Ordre, écrit J.-B. Willermoz, avait perdu tous ses Réaux-Croix en 1822. Trop vite dit. Pourtant, le T. P. M. Destigny, qui mourut en 1868 ou 1869, conservait les archives coëns depuis 1809; il ne fut Grand Souverain de l'Ordre, ni son mainteneur d'aucune façon, que dans la légende. Au XXe siécle, des filiations rituelles prétendues sont fallacieuses; elles accusent souvent une confusion de fait entre le Régime Écossais Rectifié et les Élus coëns.
L'Ordre des Élus coëns a été réveillé, par la grâce d'une filiation spirituelle vérifiée, en 1942-1943: Georges Lagrèze (19431946), puis Robert Ambelain (194(e1967), Grands Maîtres; Ivan Mosca, Grand Souverain, à partir de 1961. Des frères opèrent seuls ou en groupes, dans l'autonomie, tous issus de la même résurgence.
Outre la communion romaine qui rend bien un culte d'intention et d'action cérémonielle, il devait en exister un vraiment apostolique et ignoré qui Opère au nom de la famille humaine, le vrai culte apostolique des trois facultés d'intention de volonté et d'action, qui touche réellement au but de l'initiation chrétienne. Cette opinion de Vialetes d'Aignan, protestant converti, pose le problème religieux que soulève l'Ordre des Élus coëns; il en esquisse une solution à perfectionner.
Un autre problème se repose et engage la franc-maçonnerie. Martines lui-même a évoqué « les sciences sublimes qui sont enfermées dans notre ordre caché sous le voile de la maçonnerie », tout en étendant d'aventure sa grande souveraineté à tous les ordres de la maçonnerie. Mais toute la maçonnerie ne revient-elle pas à l'Ordre affranchi par Martines ? Et que vaut un voile ?
Le narthex du temple est propice à une réconciliation de principe. Willermoz doit à sa perspicacité et à son expérience d'avoir émis deux observations qui cernent ce principe.
«La f.-. m.-.. fondamentale n'a pas essentiellement d'autre but que la connaissance de l'homme et de la nature, étant fondée sur le tempLe de Salomon, elle ne peut pas être étrangère à la science de l'homme puisque tous les sages qui ont existé depuis sa fondation ont reconnu que ce fameux temple n'a existé lui même dans l'univers que pour être le type universel de l'homme général dans ses états passés présents et futurs, et le tableau figuré de sa propre histoire » (au duc Ferdinand de Brunswick, 20 janvier 1780) Nous nous fixons sur la base de la maçonnerie qui est le temple de Jérusalem, parce que ce temple fameux est le type universel de la vraie science de l'homme, substitué, à cause de sa perfection, à tous les types ou symboles qui l'avaient précédé... Ce temple est miraculeux )> (30 mai 1780).
L'Ordre des Élus coëns ne compta au mieux qu'une douzaine de temples et queLques dizaines de membres mais il intéresse l'histoire, tant maçonnique que religieuse.
R. A.
EMPIRE ESPAGNOL
1. La Franc-maçonnerie et l'indépendance les Antilles
11. Amérique continentale
L'histoire de la franc-maçonnerie en Amérique du Sud pose essentiellement comme objet de réflexion celle de La place occupée par les loges* dans la mise en place de l'indépendance face à la métropole espagnole. Mais l'étude révèle de sévères lacunes et les réponses restent partielles car l'approfondissement du débat mériterait que l'on opère une distinction entre véritables loges maçonniques et simples sociétés conspiratrices, et une différenciation entre loges régulières et loges irrégulières, puis entre sociétés patriotiques et sociétés indépendantistes. Enfin, il faudrait encore tenir compte de la part de l'implication individuelle ou informelle et de la présence de loges authentiques bien structurées.
Si complexe soit-elle, on ne peut aborder cette question sans rappeler la chronologie des implantations. Selon Arus et Fey, la maçonnerie est présente sur le continent au Venezuela en 1808 ou 1809, en Argentine en 1814, au Chili en 1817, en Colombie (Nouvelle-Grenade) en 1811 ou 1827, au Pérou en 1830, au Mexique en 1840, en Uruguay en 1855, au Paraguay en 1889, au Panama en 1907, en Bolivie en 1916. On sait cependant que, depuis le XVIIIe siècle, la maçonnerie a prospéré aux Antilles (à Cuba* et Saint Domingue) et au Nicaragua. Il semble donc logique d'aborder la question par un état des lieux concernant la maçonnerie insulaire.
1. La franc-maçonnerie et l'indépendance .les Antilles
Les origines de la nébuleuse latino-américaine se situent certainement à Cuba et à Saint-Domingue, deux territoires qui mettront beaucoup de temps à quitter le giron espagnol. Cela mérite déjà d'être signalé, car il est un peu paradoxal, en raison d'une historiographie faisant la part belle au complot, que ce soit dans des territoires perdus seulement entre 1865 et 1898 que la franc-maçonnerie ait beaucoup prospéré. À Saint-Domingue, on sait que le Français Morin* a fondé, le 26 octobre 1764, la première loge du Rite Écossais en Amérique latine (La Parfaite Harmonie). Fortement maçonnisée par les Français, l'île vit une période très troublée marquée par les alternances entre les périodes de domination française et celles de domination espagnole. Ainsi, après le « Cri de Juan Sanchez Raminez ", les Français sont chassés et les Espagnols reviennent, entre 1809 et 1821, avec la loge Philanthropia, grâce aux démarches du gouverneur et capitaine général Pascual Real. De nombreuses personnalités dominicaines, notamment des prêtres, la fréquentent mais, en novembre 1821, le « Cri de Nunez de Caceres » entraîne le départ définitif des Espagnols et, au début de 1822, l'invasion haïtienne. La maçonnerie d'obédience* espagnole disparaît à son tour puis le nombreuses loges haïtiennes sont fondées jusqu'en 1844, date à laquelle le « Cri d' in dépendance » donne lieu à une nouvelle période d'instabilité politique et maçonnique. L'action de Jean-Hippolyte Eresnel pour restaurer la maçonnerie dans l'est de l'île rencontre l'opposition de dirigeants comme Santana: cela débouche sur la dissolution de l'Ordre à Saint-Domingue jusque dans la décennie 1850. Le 16 février 1861 est enfin constitué El Supremo Consejo del grudo 33 dont le Grand Commandeur est Tomas Bobadilla. Un mois plus tard, le pays étant annexé à l'Espagne, les loges sont à nouveau persécutées, jusqu'au retrait définitif de celle-ci en 1865. C'est seulement à partir de cette date que la francmaçonnerie se réorganise... jusqu'à notre époque. Cette histoire mouvementée illustre déjà l'impossibilité pour la maçonnerie de jouer un rôle décisif dans l'histoire politique de l'île.
À Cuba, vers la fin de la guerre de Dix Ans (1878), le journaliste Rafael de Rafael, le directeur du journal de La Havane La Voz de Cuba, entama une longue polémique avec plusieurs maçons cubains au sujet des « fins authentiques » et du « sens réel » de la maçonnerie. Ces articles ont été publiés par la suite à Madrid dans un ouvrage posthume, préfacé par José de Vildosola. On y soulignait la nécessité de « sauver Cuba des ambitions de ses propres fils et de conserver pour l'Espagne cette terre lointaine pour laquelle elle se ruine et se vide de son sang aujourd'hui après l'avoir découverte, civilisée et élevée au faite de sa splendeur et prospérité ~>. On pouvait lire à la suite que « ce qui a contribué à maintenir pendant de longues années cette lutte sanglante, aussi fatale pour Cuba que pour l'Espagne, c'est l'infatigable Labeur de la maçonnerie.
Entre cette ouvre et de nombreuses autres jusqu'au début du XXe siècle, le fil conducteur est le rôle joué par la maçonnerie dans la perte de la souveraineté espagnole à Cuba, Puerto Rico et aux Philippines... malgré l'absence de documents d'archives confirmant cette thèse. À son appui, on a également insisté sur le fait que « la tradition maçonnique cubaine était antérieure et beaucoup plus importante que l'espagnole » (Sanchez Ferré).
Selon l'historiographie cubaine, la maçonnerie joue ainsi un rôle crucial puisque « la conspiration s'étendit au cours des premiers mois de 1868 dans les principales localités d'Oriente par l'intermédiaire des loges maçonniques qui existaient dans le pays. Grâce à la direction de la loge mère*, le Grand Orient de Cuba, dont le siège était à Santiago, il fut aisé de fonder des ateliers dans tous les villages de l'intérieur de la province, dans lesquels on invitait à entrer les propriétaires terriens, les gens ayant une profession et les personnaLités indigènes les plus notables de chaque localité. » La participation des ateliers cubains a surtout pour conséquence, alors que la maçonnerie espagnole commençait à jouir d'un régime de tolérance, de déclencher une répression contre les maçons cubains. Selon Byrne, en 1869, plusieurs maçons unis au Grand Maître Andres Puente furent surpris et conduits à Cobre où ils furent fusillés comme traîtres et, le 5 mars 1870, plus de 50 maçons qui célébraient une tenue* funèbre furent Jetés en prison Durant cette période, on sait de manière sûre que la maçonnerie cubaine se consolide alors que la maçonnerie espagnole subit les contrecoups de la guerre d'indépendance cubaine (1895-1898). Dans la Grande Antille, les loges furent fermées sur ordre du Capitaine Général en avril 1895 et, à Porto Rico, les loges qui poursuivirent leur activité jusqu'en 1897 furent suspectées.
Les maçons espagnols sont victimes de la méconnaissance des structures profondes de l'Ordre et du succès des thèses comploteuses parce que l'on associe la décadence de l'Espagne aux périodes libérales de son histoire. Pourtant les obédiences espagnoles n'hésitent pas, face à la radicalisation du conflit, à faire vœu de loyauté envers la métropole, voire à mourir pour elle Le Grand Orient National d'Espagne est le premier à se prononcer dans ce sens Pilades, le Grand Commandeur et Grand Maître, ratifie ainsi le 14 avril 1895 une déclaration institutionnelle dans laquelle il se prononce en faveur de «l'intégrité de la patrie » tout en reconnaissant l'apolitisme de la maçonnerie dont la vocation est « de s'élever audessus des luttes obstinées des partis ». Plus tard, au moment de la crise des Philippines, l'obédience récuse sans ambages les accusations de flibusterie émises envers la maçonnerie espagnole et affirme que « le sentiment de la patrie ne se discute pas et qu'avant tout, nous sommes des Espagnols». Miguel Morayta* publie dans la presse une lettre qui, répondant à l'ordre de fermeture des ateliers à Cuba, met en évidence que la raison d'être de la présence maçonnique espagnole à Cuba est de maintenir l'île dans u n esprit d'allégeance à la mère patrie. Aux Philippines, où les maçons indigènes optent majoritairement pour l'indépendantisme, les maçons espagnols restent sur leur position de toujours, conjuguant anticléricalisme et politique assimilatrice. Une autre obédience espagnole, représentée à Cuba, prend les mêmes positions. Il s'agit du Grand Conseil Général Ibérique, avec sa Grande Loge Symbolique du Rite Ancien et Primitif du Rite de Memphis-Misraïm, né en 1887, ouvert aux ouvriers et aux femmes et caractérisé par « l'extravagance » du rite et les préoccupations sociales et politiques de tendances républicaine et anticléricale proches de celles de la Libre Pensée* en Espagne. Dirigée par son Grand Maître Isidro Villarino à partir de 1893, cette organisation, bien implantée aux Canaries et à Cuba dans des établissements d'allure irrégulière et bien que mal vue des autres obédiences, se caractérise aussi par un « espagnolisme » qui transparaît dans de nombreuses déclarations. Ainsi, on entend dire mg Parmi les maçons, il y a peut-être des flibustiers ou des partisans de l'indépendance, mais que personne ne doute que la quasi-totalité des maçons espagnols aiment à l'excès leur patrie une et puissante et n'admettent pas qu'il existe quelqu'un de plus patriote qu'eux. » Par la suite, lorsque les Américains interviennent, Villarino publie un véritable appel au patriotisme: « En tant que maçons, nous sommes des ennemis décisifs de la guerre, mais avant d'etre maçons, nous sommes espagnols et, en tant que tels, nous aimons notre patrie avec ferveur et nous acceptons et proclamons la guerre, non sans ignorer ses conséquences fatales et funestes, tout comme ne les ignore aucun homme de bon sens. »
La thèse récente de J. M. Castellano Gil confirme deux points importants. Si la participation de maçons aux luttes indépendantistes est incontestable, on ne peut pas cataloguer l'ensemble de l'institution et la qualifier de favorable dans son ensemble. Les initiatives sont individuelles. D'autre part, l'auteur a montré la « mixité des ateliers » et mis à mal la thèse, sur laquelle s'appuyaient les maçonnologues cubains et espagnols, d'attitudes différenciées selon que les loges étaient peuplées d'indigènes ou d'Espagnols. Le caractère essentiellement cubain de l'implantation d es ateliers, la connaissance du personnel des loges et l'analyse de la participation des macons dans les secteurs politiques locaux contribuent ainsi à démystifier le rôle de la maçonnerie dans les luttes de l'émancipation antillaise Par ironie du sort, les Loges rattachées à des obédiences espagnoles implantées à Cuba sous l'égide de Ramon Bru, dans la décennie 1870, sont nées avec l'objectif présumé de contrecarrer le travail d'appui que les ateliers étaient sensé faire auprès du mouvement conspirateur et indépendantiste. En fait, la thèse de la maçonnerie à Cuba « divisée en deux » fut surtout créée par les appareils de propagande des obédiences espagnoles péninsulaires et leurs représentants sur l'île. Elles purent justifier l'hégémonie territoriale de la Gran Logia de Colon et Isla de Cuba établie légalement depuis longtemps sur des critères maçonniques reconnus au plan international. Signalons enfin que la suspension des activités maçonniques, à partir du déclenchement de la guerre d'indépendance, ne suscita pas de grandes protestations parmi les maçons locaux, même s'il y eut quelques textes regrettant la guerre et dénonçant les frères qui y participaient. Le Gran Logia Independiante Esponola de Séville affirma ainsi que les maçons qui commettaient un tel délit au sein de la Gran Logia devaient être fusillés, tout en ajoutant que des personnalités comme le Grand Maître Provincial don Segundo Alvarez, « riche commerçant et industriel à grande échelle affilié à un parti espagnol et maire de La Havane, n`était pas à proprement parler un insurgé ». La contradiction entre la guerre fratricide et le message pacifiste de la maçonnerie se retrouve « des deux cotés ». Ainsi, la maçonnerie antillaise n'hésite pas à déplorer que le gouvernement métropolitain n'ait pas su utiliser les forces vives de la maçonnerie afin de pacifier le territoire « en humanisant la guerre, dans la mesure du possible », et en tentant de concilier les intérêts de « Espagne et de Cuba, de » façon à mettre fin à tout jamais à une lutte tenace qui appauvrissait peu à peu toutes les classes sociales ».
II Amérique continentale
Sur le continent, au Venezuela notamment, l'indépendance conduisit aussi à des divisions fratricides. L'historiographie maçonnique n'hésite pourtant pas à donner la prépondérance à la franc-maçonnerie dans l'organisation de l'indépendance. L'influence de la Révolution française* a été souvent associée à l'ouvre maçonnique de Simon Rodriguez, José Maria Espana et Manuel Gual qui, dès 1793, se retrouvaient pour lire Rousseau et l'Encyclopédie. Pourtant, jamais ces hommes ne font allusion à la maçonnerie dans leurs activités. A cette époque, l'oligarchie mantouane, qui sera bientôt la clientèle des loges, ne pouvait se rallier à l'aventure révolutionnaire et alla en délégation devant le Capitaine Général dire qu'elle ne pouvait apporter son soutien à un plan infâme et détestable « qui essayait de détruire la hiérarchie sociale ». C'est seulement après la période impériale qu'elle change d'attitude. Quant aux premières loges maçonniques régulières, c'est pendant cette période qu'elles laissent des traces. En effet, en 1808 fut fondée San Juan de Morgarila, à Pampatar, un atelier qui dépendait d'une loge madrilène. Il est dissous avec l'arrivée du général royaliste Morillo et reconstitué après l'indépendance. Une deuxième loge, La Perfecto Armonia, est érigée à Cumana (1810) par un délégué de la Grande Loge de Maryland et reste sous la juridiction de celle-ci jusqu'en 1823. En 1812 est créée à Barcelone {de l'État Anzoategui) Protectoro de las virtudes qui compte en son sein d'illustres maçons vénézuéliens, notamment des généraux.
Dans toute la Grande Colombie, le rôle de la maçonnerie dans l'indépendance est également évoqué. Sur le plan des faits, on peut signaler que la première loge lut fondée par l'Américain Charles Mac Turner et s'installa dans le port de Campano sous le nom de Patria. C'est le nom du brigantin sur lequel il naviguait auprès de Ramon Maneiro depuis Margarita. La loge est détruite l'année suivante par Francisco Tomas Morales mais, à la fin de 1823 quand José Antonio Paez (33°) proclame l'indépendance, 18 loges auraient fonctionné. Derrière Diego Bautista Urbaneja, elles décident de fonder, à Caracas, la Gran Logia de la Gran Colombia, la matrice de là maçonnerie dans ce territoire. Installée ]e 2?4 juin 1824. elle compte Cerneau* parmi ses membres et après bien des péripéties, une Gan Logia de Venezuela la remplace en 1838.
La présence des chefs de file du mouvement d'indépendance au sein de la Maçonnerie latino-américaine constitue également un important élément du débat, les exemples de José de San Martin au sein de Lautaro* et de Miranda* au sein de la Gran Reunion Americana* en témoignent. On sait que ces deux sociétés ne sont pas des clubs maçonniques à proprement parler, mais San Martin fut peut être initié au sein de La Parfaite Amitié et la spécificité des structures de sociabilité en Amérique du Sud place bien la maçonnerie dans une position stratégique. En effet, à la différence de l'Europe les loges tendent à occuper le vide laissé au sein de l'espace de socialisation politique par l'absence de sociétés politiques, sinon embryonnaires, qui ne peuvent assumer pleinement cette mission Les loges n'échappent pas à l'utilisation comme infrastructure subversive. En outre, l'influence de la culture politique anglo-saxonne permet aux ateliers maçonniques de s'ériger, dans leur fonctionnement quotidien, comme une forme de sociabilité démocratique posant une alternative à la culture hispanophone. On voit que cette question mérite d'être réexarninée en détail à l'aune d'une autre lumière que celle qui est réfléchie par une historiographie passionnelle.
M. de P.S.
EMPIRE NAPOLÉONIEN
voir Grand Empire