EASTERN STAR
ECKLEFF
ÉCOLE DU NORD
ÉCOSSAIS
ÉCOSSAISE 133 (L')
ÉCOSSE
ÉDIMBOURG
ÉDUCATION POPULAIRE
ÉGLISE[S]






EASTERN STAR
EASTERN.JPG (65K) L'Eastern Star ou Ordre de l'Étoile d'Orient est un Ordre mixte original où les femmes* sont admises à condition d'appartenir à la famille d'un maître* maçon de quelque degré que ce soit, en tant qu'épouse, veuve soeur, mère, fille, belle-fille où petite-fille. Puisant son origine dans l'histoire des rites d'adoption* français et américains du XIXe siècle, c'est l'Ordre maçonnique mixte le plus important dans le monde. L'édifice doit sa construction à trois figures successives l'ingénieur géologue Rob Morris (alias Robert W. Peckham 1818-1888}, initie en 1845 à Oxford Lodge n° 33 dans le Mississippi et Grand Maître du Kentucky en 1858 1859, Robert Macoy (181.5-1895), initie en 1848 à la Lelvanor Lodge n° 191 de New York et ayant reçu la quasi-totalité de tous les grades pratiques, et Je pasteur de l'lndiana Willis Darwin Engle (1846-19259. Morris à mis en place des rituels qu'il constitue en s'inspirant de la Bible*. Le premier, Le Livre mosaïque est édite en 1855. Prenant le titre de « Très Illuminé Grand Luminaire » il crée une « suprême constellation !) du Rite d'adoption américain, présidant des diverses « constellations » des États. En 1860, il simplifie le rituel dans le Manuel des degrés de l'Eastern Star et change les C constellations » en « familles » soit les loges* dans les autres obédiences*. Les annexées 18fiO-1867 sont en tait une période intermédiaire où se met en place ]e nouveau système. En 1865, Rob Morris publie son dernier ouvrage, Le Rosaire de l'Étoile d'Orient

Robert Macoy, qui se voit déléguer la direction de l'Eastern Star par Morris, parti pour la Terre sainte, crée une société d'édition maçonnique et écrit de nombreux ouvrages dont la célèbre encyclopédie maçonnique qui porte son nom. En 1856 et 18.57, il est Députe Grand maître de La Grande Loge de New York. Sur le plan rituel, Macoy utilise le Rosaire comme document de référence et publie, avec l'accord de Morris le Manuel de l'Ordre de l'Eastern Star qui est adapte au système de la maçonnerie d'adoption*. En 1868, Macoy réorganise les degrés de l'Eastern Star qui sont fixes. 11 fonde le Suprême Grand Chapitre, dont le siège est établi à New York en 1870, Celui-ci couvre un ensemble de chapitres dans 34 États qu; préservent une certaine autonomie. 11 publie le rituel du Rite d'adoption intitule Livre d'instruction sur l'organisation gouvernement et cérémonies des chapitres de l'Ordre de l'Eastern Star qui devient la base de tous les autres rituels de l'obedience.

Responsable du développement de l'Ordre en 1876, Engle fonde au cours d'une assemblée générale une base administrative centralisée avec un rituel définitif lors du Grand Chapitre Général du 15 novembre 1876. Le premier Grand Chapitre est ouvert le 31 octobre 1877 dans le Michigan et il naît un à deux chapitres par an jusqu'en 1916. à partir de 1922, sa croissance ralentit. Le rituel de l'Eastern Star se caractérise par l'utilisation de symboles spécifiquement féminins, qui excluent ceux de la construction tout en empruntant les lignes Générales de la maçonnerie classique. L'essentiel du symbolisme porte sur une étoile à cinq branches représentée par cinq soeurs dans la loge qui siègent autour d'un autel central à la pointe de l' étoile. Chacune représente une femme célèbre de la Bible (Adah au sud-est de l' étoile Martha au nord, Ruth au sud, Electa au nord-est et Esther à l'occident) et symbolise une figure mythique de femme. Une loge ne peut ouvrir valablement ses travaux que si un homme au moins est présent. La présidente de la loge est appelée « vénérable matrone » elle doit être secondée par un frère, dénomme le « vénérable patron ».

L'Eastern Star se caractérise principalement par ses ouvres philanthropiques. I,'action engagée par sa principale figure emblématique, Clara Barton. en témoigne. En 1870, elle se porte volontaire pour agir dans les services de la Croix Rouge internationale au cours d'un séjour en Europe. Elle rentre aux États-Unis en 1873 et c'est à son retour, en tant que fille de franc-maçon, qu'elle demande à être initiée à l'Ordre de l'Eastern Star, ce que fait Morris. Cette démarche aurait motive son engagement dans le Comité national américain en 1877, à la suite de quoi la direction de la Croix-Rouge internationale la pressent pour en prendre la tête en Amérique. Ce qu'elle fait en 1881; elle en reste présidente jusqu'en 1904. Elle prend personnellement la tête de plusieurs expéditions pour porter secours aux victimes de guerres et de catastrophes naturelles. En 1898, cette grande humaniste est sollicitée pour qu'un chapitre de l'Eastern Star prenne son nom: elle accepte, mais e]le n'y est admise qu'en 1906.
I. M.


ECKLEFF,
Carl Friedrich (Stockholm 1 723- J 786) Comme Estienne Morin * et von Hund*, Eckleff est le fondateur d'un rite* qui existe encore aujourd'hui le Rite Suédois. Rudbeck à montre que la famille Eckleff était d'origine bourgeoise. Georg Henning Eckleff, conseiller à la cour de Suéde*, épouse en 1722 Inge Stenhagen dont le pere, chef des cuisines du roi Charles XII, sera anobli en 1743. Lorsque Georg Henning Eckleff meurt en 1732, la famille habite Kiel. Sa veuve retourne habiter Stockholm avec son fils Carl Friedrich. En 1738, celui-ci est immatriculé à l'université d'Uppsala Plusieurs auteurs suédois suggèrent qu'il aurait acquis ses connaissances de français et d'allemand au cours de voyages effectues à l'étranger vers 1740. Sauf pour un séjour à Kiel, il n'en existe aucune trace. Carl Friedrich Eckleff fut un petit fonctionnaire. Engage en 1742, à l'âge de 19 ans, comme secrétaire suppléant à la chancellerie de la cour de Suéde, promu copiste en 1746 avec un salaire annuel de 200 thalers d'argent, il est titularise en 1754. Ses appointements passent à 300 thalers deux ans plus tard à un moment où une loge de Stockholm exigeait 100 thalers comme droits d'initiation*. Au moment de sa démission en 1767, il à atteint le rang de chancelier du Conseil avec un salaire inchangé.

Son premier contact connu avec la maçonnerie se situe le 8 décembre 1753 lors qu'il demande à être reçu à Stockholm dans la loge Saint-Jean Auxiliaire. Refuse, il devient membre de la loge sauvage du bijoutier Lijdberg régularisée les 3 septembre et 22 octobre 1756 par Saint-Jeun Auxiliaire, dont une partie des membres forme le 24 juin 1757 la loge Saint-Edward. Le 30 novembre 1756, en vertu d'une patente dite étrangère dont on ne connaît ni l'origine ni la teneur, Eckleff fonde à Stockholm une loge de Saint-André dénommée L'lnnocertte et, le jour de Noël 1759, crée le Grand Chapitre Illumine qui comporte alors 7 grades. Le 1er mai suivant, i1 fonde la loge n° 7 de Stockholm. Lorsque la Grand Loge Nationale de Suéde est établie, sans doute le 27 décembre 1761, Eckleff est assistant du Grand Maître Carl Friedrich Scheffer.

En mars 1764, Eckleff autorise le frère Schopp, envoyé de Berlin par le médecin Général Zinnendorf*, à prendre copie de différents grades en provenance de France et d'Angleterre dont on ne sait pas comment ils sont entres en sa possession. Zinnendorf paye à Eckleff 220 ducats pour une patente l'autorisant à établir une loge et un chapitre* à Berlin. Eckleff s'achéte alors une propriété de 20 000 m2 pour 4 000 thalers d'argent, une impressionnante quantité de livres et quitte définitivement son poste de fonctionnaire le 16 mars 1767. Mais des l'année suivante n' étant pas en mesure de payer les intérêts des hypothèques, il risque d'être saisi. 11 se met à boire, n'assiste plus aux réunions du Grand Chapitre, abandonne sa charge à la tête de l'innocente en novembre 1768 et n'est plus Grand maître Adjoint l'année suivante. La vente aux enchères d'une partie de sa bibliothèque (4 000 livres et 1 500 brochures, mais il conserve ses ouvrages maçonniques) à lieu du 22 juillet au 22 septembre 1769 Le 14 mai 1774, il remet sa charge de Maître de l'Ordre au duc Carl de Södermanland auquel un an plus tôt il à vendu ses archives maçonniques. Devenu Grand Maître de la Grande Loge de Suéde le 30 novembre suivant à la suite de la démission de Scheffer, le duc Carl casse la patente qu'Eckleff avait transmise à Zinnendorf et la déclare illégale en avril 1777. Deux ans plus tard, Zinnendorf se rend à Stockholm où il fait enfin la connAissance d'Eckleff. Celui-ci meurt le 30 juin 1786.
A. B.


ÉCOLE DU NORD
Ce que l'on appelle l' École du Nord est reste longtemps mystérieux faute de documents, jusqu'aux travaux d'Auguste Viatte et de Gerard van Rijnberk. Elle constitue un chapitre de l'histoire de l'illuminisme*, ce courant ésotérique de l'époque pré-romantique et romantique marque par la présence de la théosophie. La principale personnalité de l'école du Nord est le prince Karl von Hessen-Kassel (1744-1836), beau-frère du roi de Danemark Chrétien VIII et gouverneur royal des duchés de Schlesvig-Holstein. II s'est occupe toute sa vie durant d'alchimie*, mais aussi de franc-maçonnerie à tendance « mystique » (notamment du Régime Écossais Rectifie*). C'est chez lui que « l'immortel » comte de Saint-Germain vient mourir en 1784, époque à partir de laquelle Karl parvient à se consacrer presque entièrement à l'ésotérisme. Après avoir combattu en Norvége contre la Suéde pour le compte de la couronne danoise, il se retire définitivement dans son château de Gottorp, où Cottof, près de Schlesvig. Mais c'est durant toute sa vie qu'il cherche à allier une grande piété chrétienne à la recherche de communications avec l'au-delà et de révélations de toutes sortes. Ce théosophe veut avant tout hâter le règne de Christ: son goût pour l'eschatologie lui confère la certitude de vivre les derniers temps de l'histoire. Son véritable éveil théosophique commence ainsi en 1777, quand il découvre les oeuvres de Jacob Boehme. Ce qu'on appelle communément «l'école du Nord » va alors correspondre à la concrétisation la plus importante de la vie ésotérique du prince Karl.

En 1782, il se lie l'amitié avec Hans Heinrich von Ecker und Eckhoffen, l'un des fondateurs de l'Ordre para-maçonnique dit des Frères Inities de l'Asie*, très actif en Autriche*. Les archives de la Grande Loge de Copenhague conservent un fascicule de notes écrites par Karl, intitulé Journal secret, qui fait apparaître de façon certaine la nature de l'enseignement dispense par von Ecker und Eckhoffen: il s'agit essentiellement d'exercices consistant à regarder fixement des objets où des points lumineux afin de développer une forme de clairvoyance. Il semble qu'il faille voir la les premiers fondements d'un enseignement prodigue par Karl à un certain nombre de disciples choisis, parmi lesquels le prince héritier Frederic de Danemark, sa femme, la fille de Karl {Marie-Sophie Frederike), la comtesse Augusta Stolberg, seconde épouse d'André Pierre Bernstorff (ministre célèbre), André Pierre Bernstorff lui-même, la comtesse et le comte von Reventlow.

C'est en 1792, où peu avant, que le rituel théurgique lie à ces enseignements paraît mis au point, probablement par Karl, pour l'essentiel. Cette magie blanche à pour objet l'évocation d'esprits angéliques, mais aussi de Jésus lui-même. Bien que le texte du rituel n'ait pas été conserve, on sait qu'il vise à susciter l'apparition d'une lumière, considérée comme étant la plupart du temps celle du Christ. D ' aspect phosphorescent comme celui d'une étoile, cette lumière est sensible aussi au toucher. Elle se manifeste sous la forme de chiffres et de lettres*, répond par oui où par non à des questions qu'on lui pose, fournit des instructions, dispense des enseignements. Ce qui lui est ainsi communique se rapporte souvent au retour du Seigneur, annoncé comme imminent où pour bientôt. On peut évidemment comparer cette manière magique d'interroger des entités célestes à celle dont usent à la meme époque les fidèles de la Sainte-Parole des Illumines d'Avignon*. Dans les deux cas, il s'agit de pratiques théoriques, mais dans celui de l'école du Nord les phénomènes lumineux occupent une place prépondérante, contrairement à ce qui se passe pour les disciples rassembles autour de Dom Pernéty.

On dispose à partir de cette date de bon nombre de correspondances, 3ournaux intimes... de la main du prince Karl lui-même et de la comtesse Bernstorff, ainsi que de Johann Caspar Lavater*, le célèbre pasteur de Zurich. Les membres de cette École du Nord ont tenu, en effet, à inviter Lavater, le pere de la physiognomonie, à se rendre à Gottorp en 1793; ils lui ont offert de se faire accompagner par sa fille Nette et de lui rembourser ses frais de voyage. Lavater se rend donc à Copenhague et à Gottorp, où il séjourne du 22 juin au 1er juillet 1793. Le compte rendu, qu'il rédige peu après (Nachtrag zu dem Resulte meiner Reise) et ne fait pas éditer, nous renseigne de façon détaillée sur les pratiques de l'école du Nord et les apparitions dont il à été le témoin.

L'école du Nord professe l'étranger croyance selon laquelle l'apôtre Jean, le disciple bien-aime, est encore en vie (Jean 21, 22: « Le Christ dit: "Et s'il me plaît à moi qu'il demeure jusqu'à ce que je vienne ?" ». Or, cette interprétation littérale du texte évangélique coïncide tout à fait avec l'espoir, nourri depuis déjà longtemps par Lavater, de rencontrer un jour l'apôtre Jean en personne. Le 29 juillet 18110, i] écrira encore au prince Karl pour lui demander d'inciter l'apôtre à venir lui rendre visite à Zurich. à ce moment-la, les pratiques et les rites de l'école du Nord semblent avoir déjà cesse, mais les croyances qui les sous tendent n'ont pas disparu chez le prince Karl, non plus que dans le cercle d'illuminés qui l'entourent.
A. F.


ÉCOSSAIS
AASR 13° t/m 20°
AASR 23° t/m 30°
ECOSTENU.JPG (75K) ECOSSAIS.JPG (97K) « Les mots perdent leur sens à mesure qu'ils prennent de la valeur » Cette remarque de Valéry s'applique particulièrement au mot « écossais ». Le terme se voit attribuer en maçonnerie. des significations multiples mais toujours auréolées de prestige et de mystère. Les francs-maçons ont même forgé le néologisme « écossisme » tout aussi insaisissable lorsque l'on essaie de le faire entrer dans une définition précise. I1 convient de rappeler les significations successives que le mot à pu avoir dans les loges*.

Chronologiquement, « écossais » est d'abord le nom de l'un des plus anciens hauts grades*. C'est à Paris, le 11 décembre 1743, que nous trouvons le premier témoignage de l'existence du mot La Grande Loge de France* met en garde les frères contre ce qui lui semble une nouveauté: « Ayant appris depuis peu que quelques frères se présentent sous le titre de maître écossais et revendiquent dans certaines loges, des droits et privilèges... » En 1744, dans L'Ordre des francs maçons trahi, l'abbe Pérau confie «Je n'ignore pas qu'il court un bruit vague parmi les francs-maçons, touchant un certain ordre qu'ils appellent les Écossais, supérieur à ce que l'on prétend, aux francs-maçons ordinaires et qui ont leurs cérémonies et leurs secrets à part.,, 11 semble y avoir eu, des les origines, plu sieurs écoles à propos des cérémonies et secrets* particuliers des Écossais. Ainsi, à Paris, le grade mystérieux de l'abbe Pérau, condamne dans un premier temps par la Grande Loge de France en 1743, est. selon toute vraisemblance, celui que nous connaissons sous le nom d' Écossais des 3 J., encore appelé Écossais de Paris où Écossais de Clermont. Dans la France méridionale, la maçonnerie semble avoir primitivement pratique un autre type d'écossais dit « de la Voûte », très tôt présente comme une « maçonnerie de Perfection ». Cet « Écossais de Perfection» version française du Royal Arch* britannique, reprend un thème classique de l'ésotérisme * judeo-chrétien. Il révèle l'existence d'une parole perdue, le véritable nom de Dieu, précieusement conservée dans une voûte secrète dissimulée sous le temple* de Salomon. Ces grades d Écossais conserveront toujours une grande importance dans la maçonnerie de hauts grades. Par extension, à partir du milieu du XVIIIe siècle, les termes « écossais » où « écossisme » deviennent synonymes de hauts grades. Cette signification est probablement la plus légitime en tout cas la plus logique. Au début du XIXe siècle, lorsque le Grand Chapitre Général* de France affronte ]a concurrence d'un nouveau rite qui s'intitulera « écossais », il revendiquera bien haut son « écossisme » et sa parfaite régularité « écossaise ».

Dans les années 1760 apparaît à Marseille un corps maçonnique qui s'intitute « Mère Loge Écossaise ,,* L'appellation manifeste la légitimité à laquelle prétend la mère loge pour tous les grades y compris les hauts grades. Elle pratique d'ailleurs un système en 7 grades des plus classiques (apprenti*, compagnon*, maître*, Maître Parfait, Élu, Écossais et Chevalier d'Orient). Elle à un grand rayonnement en Provence, puis plus largement dans le Midi de la France, et enfin à Paris.. Là encore ce que l'on finira par appeler le « Rite Écossais » professe par la mère loge et ses loges filles renvoie d'abord et avant tout aux hauts grades. Cependant, pour des raisons obscures, les grades bleus* pratiques par la mère loge présentaient quelques particularités comme la place des grands chandeliers autour du tableau* de loge. Par glissement sémantique, on en vint à parler des grades symboliques du Rite Écossais-c'est-a-dire du rite pratique par la Mère Loge Écossaise-ce qui aurait été quelques années auparavant un non-sens.

Au début du XIXe siècle le courant maçonnique anime par la Mère Loge Écossaise fusionne avec le Rite Écossais Ancien et Accepte, version française de la maçonnerie des Anciens*! apporte des Antilles et des États-Unis* d'Amerique par les maçons réfugies de Saint-Domingue. Les usages « écossais » et « Anciens et Acceptés » furent amalgames dans le Guide des maçons écossais. Peu à peu, le terme « écossisme » en vint à designer le Rite Écossais Ancien Accepte dans toutes ses composantes, qu'elles relèvent de la maçonnerie symbolique où des hauts grades. Cette acception du mot est cependant purement française, puisque dans la plupart des pays le Rite Écossais Ancien et Accepte est reste exclusivement un système de hauts grades.

À l'issue de ce rappel historique on peut se demander s'il ne conviendrait pas de réserver le terme d'« écossisme » à la maçonnerie de hauts grades, quel que soit d'ailleurs le système dont il s'agit.

Reste la question de l'origine du mot « écossais ». Pourquoi les maçons de la première maçonnerie spéculative*, dans les années 1730, baptisèrent-ils le grade terminal où étaient révèles,les plus hauts secrets de l'Ordre Maître « Écossais » ? On trouve d'ailleurs, un peu auparavant, des traces de Scot masters dans quelques loges anglaises. C'est probablement qu'ils avaient conscience du rôle essentiel de la maçonnerie opérative* écossaise dans la formation de la franc-maçonnerie spéculative moderne. Aux débuts de la franc-maçonnerie spéculative ce qualificatif honorait l'origine géographique -bien réelle-des plus profonds mystères de l'Ordre.
P. M.


ÉCOSSAISE 133 (L')
ECOSSE1.JPG (148K) (1861-1869) à l'origine, L' Écossaise 133 s'appelle Les Disciples de saint Vincent de Paul. Fondée en 1813, elle dépend du Grand Orient*. Surveillée comme républicaine des 1850, elle est contrainte, après le coup d'Etat, d'annuler l'élection de son vénérable* (peut-être l'écrivain Luchet), trop marque comme républicain. Elle migre, en 1853, au Suprême Conseil, car elle n'accepte pas les reformes imposées par Murat * .

Elle est déiste durant la phase autoritaire du Second Empire*, où elle est dirigée par Amédee Petit-un proche de Riche-Gardon*-, et reste un foyer républicain avec Théodore Bac, et les hommes de lettres Malapert, Auguste Luchet et Victor Borie. à la suite d'une crise interne, en 1857, Luchet en prend la direction et y fait entrer, de 1857 à 1860, une élite progressiste avec Ulbach, François Favre, Henri Brisson *, Armand Lévy, Charles Beslay, Louis Greppo. Ulbach et Favre créent, en 1858, Le Monde maçonnique, et ce dernier publiera, en 1866, d'intéressants « Documents maçonniques » C'est en 1861, comme elle s'entend refuser le titre distinctif laïque de La Solidarité qu'elle décide de se contenter de celui de L' Écossaise 133 et, en 1869, elle peut adopter celui de La Justice.

Sa réputation attire des anciens proscrits qui s'y affilient, comme Malardier, Auguste Desmoulins {le gendre de Pierre Leroux), Greppo, Camille Raspail. On y retrouve des anciens quarante-huitards des radicaux massoliens (Boutteville, de Jouvencel, Mesureur*, les trois frères de Fonvielle), quelques futurs élus de la Commune* (Beslay, Eudes, Lefrançais, Leroy, Parent, Vallés), le journaliste Charles Limousin qui créera, en 1903, la revue l' Acacia.

En 1868,« la 133 » est à la pointe de la lutte pour la démocratisation des statuts de l'écossisme; elle est suspendue et son vénérable Ulysse Parent, radié. Le feu reprendra sous la Troisième République et La Justice va être à l'origine de la création de la Grande Loge Symbolique Écossaise*. A. C.


ÉCOSSE
La maçonnerie écossaise est née bien avant la constitution de la Grande Loge, en 1736. à cette date, c'est une centaine de loges* qui adhèrent à la nouvelle structure. David Stevenson date les premiers ateliers de la fin du XVIe siècle, tels que la loge Atchinson's Haven, constituée le 9 janvier,1599 et qui survécut jusque vers 1866. à la différence de l'Angleterre, une continuité existe entre la maçonnerie opérative et les loges spéculatives. En effet, des « spéculatifs* » entrent dans les loges des le XVIe siècle, tandis que des loges entièrement composées d'« opératifs* » continuent d'exister au XVIIIe siècle. D'ailleurs, les Statuts Schaw en utilisant L'expression mason word, mot secret dont les Écossais avaient l'exclusivité, qui garantissait le sérieux professionnel et facilitait l ' embauche , permettaient de reconnaître les maçons de métier dûment qualifiés de ceux qui ne l'étaient pas, désignes du nom de cowan. En outre, le dernier Grand maître Opératif William St. Clair of Roslin, fut également le premier Grand maître spéculatif. Depuis le XVIe siècle en effet, les « chartes St. Clair» plaçaient les confréries de maçons sous le haut patronage de l'illustre famille des St. Clair of Roslin. En 1736 William Saint Clair of Roslin, renonçant pourtant à ce privilège ancestral afin de permettre à la nouvelle Grande Loge de se doter d'un Grand maître de son choix, est reconduit par celle-ci dans ses fonctions: la Grande Loge désire poursuivre la tradition opérative, tout en flattant l'aristocratie écossaise. à partir de cette date, elle va renouveler son Grand maître tous les ans; chaque Grand Maître sortant choisit son successeur, toujours un aristocrate, et cela jusqu'en 1751. La Grande Maîtrise est cependant à cette époque une fonction honorifique, le pouvoir étant dans les faits assure par le Grand maître Adjoint-Députe Grand Master.

Dans leur grande majorité, les membres de la Grande Loge d'Écosse* sont de chauds partisans de l' Union entre l 'Angleterre et l'Ecosse (1706) et les amis des Jacobites* sont minoritaires. Le marquis de Tullibardine, fils du premier duc d'Atholl, fait figure d'exception en se battant aux cotes du comte de Mar lors de la révolte jacobite de 1715. Les autres membres de la famille Atholl soutiennent d'ailleurs ardemment la cause hanovrienne et l'Union avec l'Angleterre. Entre 1717 et 1736, avant la création de la Grande Loge d'Écosse, six des dix-neuf Grands Maîtres de la Grande Loge d'Angleterre* ont été des nobles écossais et les aristocrates qui dirigent la maçonnerie écossaise oeuvrent pour le rapprochement politique et culturel avec l'Angleterre. James Douglas, 14e comte de Morton, est ainsi successivement Grand Maître d'Écosse en 1734 et Grand Maître d'Angleterre en 1741, fondateur de la Royal Society d'Edimbourg en 1739 et président de la Royal Society de Londres en 1764. La franc-maçonnerie est alors un atout supplémentaire pour l'élite écossaise désireuse de s'intégrer à la vie londonienne et de bénéficier des avantages du tout nouveau Royaume-Uni. On mesure toute l'ardeur dont firent preuve les maçons écossais pour bâtir l'Union à leur implication dans l'armée. Non seulement les militaires étaient très bien accueillis par les frères, mais ils accédaient aux plus hautes dignités maçonniques et constituaient des loges specifiques, telles que la célèbre Scots Grey Kilwinning. Lorsqu'en 1778 un certain Brown, lieutenant-colonel et franc-maçon anglais, vient soutenir le duc d'Atholl, alors Grand Master Elect (c'est-a-dire élu Grand maître pour l'année suivante, selon l'usage écossais), pour recruter pour lui des soldats écossais, la loge de Kelso l'accompagne dans sa tournée et offre une prime de trois guinées à chaque nouvelle recrue.

Ce régiment, connu sous L'appellation d Atholl Highlanders, devient bientôt un fleuron de l'armée britannique, et sert le roi en Irlande*; en récompense de ses bons et loyaux services, le duc d'Atholl est meme autorise à siéger à la Chambre des Lords en tant que pair anglais. On aurait peine à trouver la moindre velléité de nationalisme écossais chez les dignitaires de la Grande Loge. à la fin du siècle, c est le commandant en chef, le comte de Moira, qui établit des relations officielles entre les Grandes Loges d'Angleterre et d'Écosse; jusque-la, les Anglais avaient fait preuve de la plus grande indifférence envers leurs homologues écossais.

Les Grands maîtres écossais sont respectes au meme titre que les Lords Provosts, titre par lequel on désignait les maires à Edimbourg, et participent en leur compagnie à toutes les cérémonies officielles. Outre sa contribution importante à l'édification des principaux bâtiments d'Edimbourg*, la Grande Loge apporte son soutien à la loge de Kelso pour la construction d'un pont sur la Tweed. La tradition se poursuit au XlXe siècle: c'est le prince de Galles en personne, devenu officiellement protecteur de la maçonnerie écossaise en 1870, qui inaugure la meme an née le nouvel hôpital d ' Edimbourg, le .New Royal Infirmary et, en 1876, la nouvelle poste de Glasgow.

La franc-maçonnerie écossaise entretient de bons rapports avec l'Église presbytérienne, du moins avec son courant majoritaire, celui des,modères; Seuls quelques dissidents de l'Église d'Écosse, les seceders, ceux qui firent sécession en 1733, condamnèrent en termes virulents les francs-maçons, mais sans parvenir à porter la moindre atteinte à leur institution. La Grande Loge fit aussi peu de cas des condamnations des seceders que de celles du pape en 1738 et 1751.

La Grande Loge d'Écosse entend jouer un rôle de premier plan tant à l'échelle régionale qu'à l'échelle nationale. Tout en contribuant au prestige de la capitale écossaise, elle apporte son soutien au pouvoir royal et oeuvre pour le maintien de l'ordre établi et pour la gloire de l'Empire britannique. Elle s'indigne officiellement de tous les attentats perpétrés contre la personne royale à la fin du XVIIe siècle. Sa bonne volonté lui vaut d'échapper à la rigueur du Combination Act, loi votée par les députes anglais pour étouffer les premiers syndicats et mettre un terme au droit d'association. Aucune loge ne contestait, il est vrai, L'ordre établi, que ce fut pour prôner une reforme électorale où pour soutenir les partisans britanniques de la Révolution française*, à l'exception peut être de la loge des Journeymen, à Edimbourg. La Grande Loge d'Écosse contribue à l'expansion de l'Empire colonial. Après avoir accorde des chartes dans les colonies américaines, en particulier à la Grande Loge du Massachusetts*, elle nomme un Grand Maître des maçons écossais en Inde*. Elle adresse des messages de félicitation au roi à l'occasion des succès militaires de Nelson contre Napoléon.

Structurellement, si la maçonnerie écossaise ne connaît pas de division aussi grave que celle des Anciens* et des Modernes* en Angleterre, elle n'échappe pas aux rivalités internes. De 1744 à 1807, la loge Mother Kilwinning n° 0*, qui se disait la plus prestigieuse d'Écosse car la plus ancienne et se disputait,pour cette raison avec la loge St Mary d'Edimbourg, fonctionne de fac,on tout à fait autonome. Au début du XIXe siècle la Caledonian Lodge fait scission de la Grande Loge d'Écosse et entraîne un certain nombre de loges à sa suite.

Depuis le XIXe siècle, les liens entre la Grande Loge d'Écosse, la Grande Loge Unie d 'Angleterre et la famille royale sont devenus très étroits. En 1969, l'actuel Grand Maître de la Grande Loge Unie d'Angleterre est devenu membre honoraire de la Grande Loge d'Écosse. La Grande Loge d'Écosse se targue cependant d'avoir un fonctionnement plus démocratique que celui de la Grande Lodge Unie d'Angleterre: ainsi elle procède à l'élection de tous ses grands officiers ce qui n'est pas le cas en Angleterre. En 1984, La Grande Loge d'Écosse comptait 300 000 maçons et la Grande Loge Unie d'Angleterre 600 000, selon le guide de la maçonnerie mondiale. Cent six Grands Maîtres se sont succède à la tête de la Grande Loge d'Écosse depuis 1736. Tous, sans exception, ont fait partie de la noblesse écossaise. C'est le baron de Burton qui à été élu Grand Maître en 1993.

Liste des Grands Maîtres de la Grande Loge d'Écosse au XVIXIe siècle *. 1736-1. 37, William St. Clair of Roslin; 1737-1738, George, 3e comte de Cromartie; 1738 1739, John, 3e comte de Kintore (Grand Maïtre d'Angleterre en 1740); 1739-1740, James, 14e comte de Morton (Grand Maltre d'Angleterre en 1741); 1740 1741, Thomas, Xe comte de Strathmore (Grand maïtre d'Angleterre en l744); 1741-1742 Alexandre, 5e comte de Leven et Meilville; 1742-1743, Guillaume. 4e et dernier cornte de Kilmarnock; 1743-1744, James, 5e comte de Wemyss; 1744-1745, James, Xe comte de Moray; 1745-1746, Henry David, 10s comte de Buchan, 1746-1747 William Nisbet de Dirleton, ] 747-1748, Francis Charteris d'Amisfield, 7e comte de Wemyss; 1748 1749, Hugh Seton de Touch: 1749 1750, Thomas, lord Erskine, comte de Mar 1750 1751, Alexandre 10e comte d'Eglinton; l751-1752, James, lord Boyd, 15e comte d'Erroll; 1752-,1753, George Drummond, lord provost d'Edimbourg, 1753-1754, Charles Hamilton Gordon, 1754-1755, James, 16e baron Forbes: 1755-1757, Sholto Charles1 lord Aberdcur, 15e comte de Morton ,Grand maïtre d'Angleterre de 1757 1761); 1757-1759 Alexandre, 6' comte de Galloway; 1759-1761, David, 6e comte de Leven et Melallie; 1761-1763, Charles, 5e comte d'Elgin et 9e comte de Kincardine, 1763-1765, Thomas, 6e comte de Kelie (Grand maïtre d'Angleteire, 1760 1765); 1765-1767, James Stewart, lord provost d'Edimbourg; 1767-1769, George, 8e comte de Dalhousie; 1769-1771. James Adolphus Oughton, lieutenant Géneral 1771-1773, Patrick 6e comte de Dumfries 1773-1774, John, 3e duc d'Atholl (Grand Maïtre d'Angleterre, 1 77 1-1 774); 1 7741 776, David Dalrsmpie, lord Westhall; 1776-17713, sir Willam Forbes de Pitsligo 6e baronet; 1778 1780, John, 4e duc d'Atholl (Grand maïtre d'Angleterre, 1775 1781, 1791-1813); 17811782, Alexandre, 6e comte de Balcarres, 1782-1784 David Ile comte de Buchan; 1784-1785, George lord Haddo; 1786-l788, Francis Chaeeris, lord Elcho, 8e comte de Wemyss; 1788 1790, 8e lord Napier, 1790-1792 George 16e comte de Morton; 1792-1791, George marquis de Huntly, 5 duc de Gordon; 1794-1796, William. ,comte d'Ancram, 6e marquis de Lothian, 1796- I798, Francis lord Doune. 10e comte de Moray; 1798 1800, Jarnes Stirling, Baronnet lordprovost d'Edimbourg.
C. R.


ÉDIMBOURG
ECOSSE3.JPG (175K) ECOSSE2.JPG (34K) Depuis sa création, la Grande Loge d'Écosse* à entretenu des liens privilégies avec la capitale écossaise. Au XVIIIe siècle, plusieurs Grands Maîtres occupent la fonction de lord provost, c'est-à-dire de maire d'Edimbourg. Ainsi, George Drummond, lord provost à plusieurs reprises, est Grand maître en 1752 et vénérable de la loge* Canongate Kilwinning en 1764. De même, le lord provost James Stewart est Grand maître en 1765 et 1766. Les francs-maçons écossais participent à la rénovation d'Edimburg au cours des cérémonies officielles, de façon très concrète. en offrant des journées de labeur: la Grande Loge d'Écosse même- à la disposition de la ville certains de ses membres, maçons par leur métier, pour la construction de l hôpital, en 1738. Certaines loges d'Edimbourg organisent des souscriptions auprès de leurs membres pour la construction des principaux édifices, en particulier pour la Bourse, qui est inaugurée en grande pompe par le Grand maître en 1753,. Par la suite, elle inaugure également l' hospice (Canongate Poor House) un établissement scolaire (la High School) et même la prison.

En 1754, selon Alexandre Lawrie, 400 maçons participent à un défile aux flambeaux organise par la Grande Loge à travers la ville, de St. .Mary 's Chapel à la High School. L'année précédente, outre les opératifs* sans affiliation à une loge de la ville, neuf loges avaient participe à la cérémonie d'inauguration de la ville (la loge militaire attachée au régiment du Général Johnston, Thistle Lodge, Vernon Kilwinning Lodge, Canongate from Leith Lodge, Dalkeith Lodge, Canongate and Leith, Leith and Canongate Lodge, St. Mary' s lodge Chapel, Leith Kilwinning Lodge et Journeymen Masons Lodge). Les trois dernières méritent qu'on s'attarde sur leur histoire parce qu'elles émargent aujourd'hui encore au registre de la Grande Loge d'Écosse. St. Mary's Chapel, mentionnée dans les statuts Schaw, ces textes maçonniques qui réglementaient la vie des opératifs, s'est longtemps battue avec la loge Kilwinning n° O pour figurer au premier rang du registre des loges écossaises. Elle obtint gain de cause meme si on ne sait toujours pas laquelle des deux loges est la plus ancienne. La loge opérative des Journeymen Masons est issue de cette loge. En 1707, les maçons de métier, sans doute mal à l'aise dans cette loge de notables d'Edimbourg, décident de fonder leur propre loge, après maintes perpétues, et intentent même un procès à St. Mary afin d'obtenir le droit de continuer à délivrer le maçon word, c'est-à-dire d'accorder leur qualification professionnelle aux apprentis* maçons (aux maçons de métier). Elle rend de précieux services à la ville d'Edimbourg: en 1734, pour la construction d'un hôpital pour orphelins, ses membres offrent 591 journées de travail au cours de l'été et 230 au cours de l'hiver. Pour avoir accepte de prêter ses locaux à une association favorable à la Révolution française* et à une reforme du système électoral en Grande Bretagne, la Journeymen s Lodge se voit réprimandée par la Grande Loge d'Écosse. La loge entretient des relations très étroites avec une société de secours mutuel, une friendly society, placée sous sa protection et destinée à porter secours aux maçons malades, à prendre en charge les frais funéraires et à venir en aide aux veuves. Elle reste également fidèle à sa tradition opérative tout au long du XIXe siècle et reçoit en grande pompe le syndicaliste américain Samuel Gompers, le 12 septembre 1918.

Le profil de la très prestigieuse loge de Canongate Kilwinning est bien diffèrent: elle regroupe les membres les plus influents de la cite au XVIIIe siècle et fournit à la Grande Loge la plupart de ses Grands Officiers. Plusieurs banquiers, des avocats, des professeurs des architectes, des militaires, des bijoutiers, également des comédiens rejoignent cette loge, sans oublier le biographe de Samuel Johnson, l'écrivain James Boswell*, qui fut aussi Grand maître Adjoint de la Grande Loge d ' Écosse.

Il est donc indéniable qu'Édimbourg à toujours été la capitale de la maçonnerie écossaise. Elle le demeure puisqu'elle abrite encore le siège de la Grande Loge d'Écosse, Freemasons' Hall, 96, George Street.
C. R.


ÉDUCATION POPULAIRE
Développer l'education populaire est l'une des raisons d'être de la maçonnerie au XIXe siècle. La méthode d'enseignement mutuel avec le tutorat, la mixte des classes, l'ouverture aux sciences peu coûteuse permettent de scolariser un plus grand nombre d'enfants, sous le patronage du comte de Lasteyrie et d'Alexandre de Laborde, futur Grand Maître Adjoint du Grand Orient*.

Sous l'Empire libéral, la maçonnerie considère que la bataille pour la scolarisation, notamment des femmes. est prioritaire. Elle le manifeste par le soutien porte à la Ligue de l'Enseignement, le projet avorte de l'oeuvre de l'enseignement sous la Grande Maîtrise de Mellinet, et par diverses initiatives locales. Les ateliers aident les écoles laïques libres, et ce mouvement va se poursuivre sous la Troisième République. Certains projets sont ambitieux. Des loges marseillaises ouvrent, sous la direction de J.-B. Brochier, une école primaire pour adultes (en juin 1868) dans le local maçonnique, puis une école primaire gratuite de filles. La loge de Saint Denis, L' Union Philanthropique, fonde en avril 1868 un pensionnat qui compte 60 élevés. La défaite militaire met un terme aux trop coûteuses initiatives, mais les loges continuent dans La meme voie. Ainsi L Avenir* apporte le quart du capital social qui permet d'ouvrir à des jeunes filles l'école laïque de la rue Jean-Lantier. Le frère Trébois! qui en est l'initiateur, préside le conseil d'administration de la Société des écoles laïques libres de Paris. Après cette initiative, un «tronc des écoles laïques » circule dans de nombreuses loges parisiennes. La Jérusalem Écossaise 99 (Rite Écossais*) fonde le Sou des écoles (avril 1875), et des comités de Sou des écoles laïques se constituent à Lille et à Marseille.

A Paris, plusieurs ateliers financent, par des matinées musicales, l'ouverture et le maintien d'une école proFessionnelle de jeunes filles, 51, rue de Belleville, dirigée par la fille du frère Vinçard Les Amis de la Patrie fondent en 1878 des « concours-examens » dans le but d'encourager l'education morale et civique. Les épreuves écrites et orales réservées à des adolescents de plus de 15 ans, .portent sur l'enseignement moral et civique, l'histoire, la géographie, l'orthographe, l'écriture et le calcul. Des médailles où des livres récompensent les meilleurs.

La réalisation la plus spectaculaire, et la seule durable, est l'ouverture des cours commerciaux du Grand Orient rue Cadet, votée par le Convent* de 1871, car elle bénéficie de l'apport financier des loges de la région parisienne puis de tout le Grand Orient. Le premier cours populaire de langue allemande est réserve aux adultes âges de 16 ans au moins. 11 est aussitôt suivi par deux cents auditeurs et, au terme de l'année scolaire, des prix sont distribues. Devant le succès, le Grand Orient est conduit à les élargir à d'autres disciplines. 1 400 élevés sont inscrits en 1876 Cette oeuvre ne peut survivre cependant que grâce à des subventions des conseils municipaux de Paris et des conseils généraux de la Seine aux mains des radicaux.

On ne saurait oublier le rôle considérable joue par les loges du Grand Orient à l'étranger. Bénéficiant d'un recrutement relativement aise, e]les ouvrent des écoles en Égypte, dans l'Empire ottoman*, en Amérique latine, en Roumanie également. Ainsi, à Bucarest, dans les années 1880, la loge Les Sages d Héliopolis fonde une bibliothèque, une école des arts et métiers, donne des conférences scientifiques, publie une revue grâce à des dons et aux revenus de représentations théâtrales. En une seule année, elle assure des consultations gratuites et remet 456 volumes à des enfants d'écoles publiques où privées. Au début du ,XXe siècle, l'intérêt des loges, en province, se déplace vers les Universités populaires* qu'elles prennent parfois en main, comme à Nancy où à Dreux.
A. C.


ÉGLISE[S]
EGLISE1.JPG (76K) L'Église catholique romaine à condamne des 1738 la franc-maçonnerie et menace d'excommunication le catholique qui s'y engageait (in Eminenti*). Bien que le Code de droit canonique promulgue en 1983 ne reprenne pas les violentes condamnations du Code de 1917, la Congrégation pour la doctrine de la foi persiste à considérer le catholique franc-maçon en état de péche grave: les pratiques maçonniques demeurent ancrées dans le relativisme ne des Lumières*, et par conséquent s'opposent au

dogme enseigné par l'Église. Pour le magistère catholique, la franc-maçonnerie reste un danger pour le salut des âmes.

Lors des débats préparatoires à la rédaction définitive du Code, la question est posée, en 1980, au Conseil pontifical de rédaction et d'interprétation des textes législatifs de l'Église de Rome par les représentants de la conférence épiscopale allemande: « Faut-il conserver intact le canon 2335 du Code de 1917, qui prévoit expressément la peine de l'excommunication pour les membres de la secte maçonnique ?»

Rappelons les termes du canon 2335: « Ceux qui donnent leur nom à une secte maçonnique ou à d'autres associations du meme genre qui complotent contre l'Église et les pouvoirs civils légitimes, contractent par le fait même une excommunication simplement réservée au Siège apostolique. » Confrontés à l'enjeu doctrinal en présence, les tenants d'une perception relativiste de la franc-maçonnerie affrontent les adeptes de la reconnaissance de l'altérité du catholique franc-maçon. Cette pratique pastorale, issue de l'ecclésiologie conciliaire de Vatican 11 (décret Unitatis redintegratio sur l'oecuménisme, promulgué le 21 novembre 1964), consiste à ne pas priver des sacrements les catholiques dits « frères séparés»; leur état de baptisé les rend, de droit, membres du Peuple de Dieu, et aptes à recevoir les moyens de salut attachés à ce statut. Nous avons retenu les interventions caractéristiques des enjeux doctrinal et ecclésiologique en présence.

S'appuyant sur les résultats des réunions menées de 1974 à 1980 par leurs représentants avec des dirigeants d'une obédience majeure en Allemagne, les évêques de la conférence épiscopale allemande déclarent que les fondements de la franc-maçonnerie contemporaine restent contraires au fondement de la vie chrétienne. Il en résulte que l'Église a le devoir d'indiquer aux fidèles le danger encouru par la foi; ce devoir implique de désigner par leur nom de telles associations. Par ailleurs, affirment-ils, le retrait de la mention de la maçonnerie du canon 2335 dans le nouveau Code rendrait difficile une réinsertion, alors que le maintien assurerait après sa promulgation son irréversibilité. L'appartenance à la maçonnerie reste incompatible avec celle à l'Église catholique romaine. En outre, l'idée de tolérance pratiquée par la maçonnerie s'exerce à l'égard des idées alors que l'Église recommande au catholique de l'exercer à l'égard des hommes. S'appuyant sur la volonté déclarée dès 1967 par les juristes romains de réduire les peines latae sententiae comme le laissaient voir les schémas de 1973 et ceux du Code en préparation qui ne citaient plus la maçonnerie ni ne l'excluaient, rappelant le constat d'une sensible réduction du nombre des peines latae sententiae, I'expert désigné par la commission, le cardinal et professeur en droit canonique S. Gomez, o. p., insiste sur la nécessité de rendre cohérentes les positions juridique et pénale de l'Église à l'égard de la maçonnerie. Il souligne l'obligation que doit assumer le législateur, lorsqu'il s'agit de latae sententiae, de déterminer précisément l'objet du délit afin que le coupable prenne avec certitude conscience du caractère délictueux de l'acte. Or, la variabilité du degré d'engagement du catholique dans la maçonnerie ne le permet pas. Pour lui, la formulation du canon 2335 ne produit pas la clarté nécessaire. Il rappelle que le législateur prévoit de laisser la responsabilité aux conférences épiscopales de légiférer latae sententiae, si elles le jugent nécessaire. il en conclut que si, en Allemagne, des raisons particulières imposent d'infliger des peines d'excommunication latae sentesitiae à des catholiques membres de la franc-maçonnerie, la conférence épiscopale nationale le peut. Cependant, la particularité de cette situation ne rend pas nécessaire d'étendre cette mesure à l'Église universelle.

Lors des deuxième et troisième sessions, le cardinal Seper, alors responsable de la Congrégation pour la doctrine de la foi, souhaite, sur la base des dommages graves produits par la maçonnerie au cours de la sécularisation, que soit laissée la mention de «secte maçonnique,» mais éliminé le terme « machination ». Le cardinal Ratzinger, quant à lui, soutient la demande de la conférence des évêques allemands. Il indique que les conclusions tirées des enquêtes qui ont eu lieu de 1974 à 1980, auprès des autorités maçonniques allemandes ne sont en aucun cas particulières à la situation de l'Allemagne. Les conclusions, émanant d'autres conférences épiscopales, différentes de celles des évêques allemands, sont. dit-il, mal informées: le relativisme est le noyau de toute notre crise de la modernité et de celle de l'Église catholique Dans cette affinité entre les principes maçonniques et les éléments de cette conscience moderne qui essaie de détruire la foi, il voit dans la secte maçonnique le danger extra-ordinaire et incomparable à tous les autres, qui rend absolument nécessaire de la mentionner dans le canon. il présente le système symbolique maçonnique comme Opposé à la vérité de la foi catholique, et dénonce le secret* maçonnique, en particulier celui qui entoure les trente degrés consécutifs aux trois premiers. Enfin, s'en prenant aux conclusions de I'expert, le cardinal Gomez, il qualifie son jugement de superficiel. Favorable à la nouvelle formulation du canon qui ne fait plus allusion à la franc-maçonnerie, le cardinal Henriquez souligne la diversité des comportements maçonniques observés dans le monde catholique.

EGLISE2.JPG (99K) ICI serait dangereux et inutile de rallumer un conflit qui a pris fin et risquer de susciter d'inutiles inimitiés. L'excommunication actuelle est inutile, car elle n'empêche pas les très nombreuses adhésions de catholiques à la franc-maçonnerie. Le cardinal Castillo Lara fait siens les avis exprimés par le cardinal Henriquez. De plus, il souligne un point capital en droit pénal canonique: on ne peut prendre le risque qu'une exploitation publique soit faite du sujet qui a été visé par la peine. C'est-à-dire que l'on ne peut admettre le caractère exemplaire de la peine, ni employer celle ci dans un esprit pastoral: la personne serait alors considérée comme un objet. La quatrième session est réservée aux votations: 58 sont favorables, 34 opposées à la formulation du canon 1374, telle que le Code de droit canonique le promulguera. Il ne sera plus fait mention de la franc-maçonnerie. La position tenue par le cardinal Henriquez, ancrée dans l'expérience vécue au Venezuela, au centre d'une collaboration pastorale avec des catholiques francs-maçons, a apporté à l'argumentation fondée en expertise du cardinal Gomez—à savoir qu'une Église particulière doit avoir la possibilité de légiférer à la suite d'une situation dont la gravité le justifierait—l'appui d'une pratique ecclésiologique réussie.

Toutefois, si le terme « franc-maçonnerie* » est absent du Code de droit canonique promulgué en 1983, le Canon 1374 concerne, de façon implicite, les relations du fidèle catholique avec l'association qu'elle représente: « Qui s'inscrit à une association qui conspire contre l'Église sera puni d'une juste peine; mais celui qui y joue un rôle actif ou qui la dirige sera puni d'interdit. » Si la nature de la peine n'est pas précisée, l'obligation existe de punir celui qui conspire contre l'Église. Et l'interdit sanctionne celui qui y joue un rôle actif. Ce n'est plus la problématique canonique de l'excommunication. Cependant, peu après la promulgation du Code de droit canonique, la Sacrée Congrégation pour la doctrine de la foi émet une tout autre interprétation du canon 1374: « Le jugement négatif de l'Église sur les associations maçonniques demeure inchangé parce que leurs principes ont toujours été considérés comme inconciliables avec la doctrine de l'Église et l'inscription à ces associations reste interdite. » De plus, il est rappelé que les autorités ecclésiastiques locales n'ont pas compétence pour se prononcer sur la nature des associations maçonniques par un jugement qui impliquerait une dérogation à ce qui a été affirmé dans la déclaration de la Sacrée Congrégation. Clairement, cette position, strictement de nature dogmatique, vise à rendre nuls les avis, notamment celui du cardinal Gomez, qui ont conduit à l'adoption du texte du canon 1374. L'article paru dans L'Osservatore Romano, « Réflexions un an après la déclaration de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Inconciliabilité entre foi chrétienne et maçonnerie», reprend pour la commenter la déclaration de la Congrégation pour la doctrine de la foi. La tradition de la création inachevée enseigne que les hommes sont les collaborateurs de Dieu. Le pouvoir auto créateur, que le franc-maçon croit réel et actif, est étranger à une conception chrétienne.

Une sémantique juridique nouvelle assure désormais aux relations du magistère catholique à l'égard de l'idée maçonnique le caractère d'ouverture que recommande l'ecclésiologie conciliaire de Vatican 11. La violente attitude d'exclusion a évolué vers l'adoption d'un comportement de communication fondé dans la catégorie sociologique de l'altérité. La reconnaissance de l'existence de l'autre peut être lue, par exemple, dans la sollicitation de la dénomination proprement maçonnique: utilisation du terme de loge*; dans la nécessité, aussi, de connaître ses modalités d'existence en créant des groupes mixtes de travail {par exemple, en France, le Service Incroyance et Foi du père Tripier) . La typologie des termes servant à définir le concept de l'ensemble maçonnique a suivi cette évolution. Le terme « secte » utilisé dans le Code de 1917, et dans le Dictionnaire de droit canonique de Naz, est devenu « association » dans le Code de 1983, puis « loges » dans le document publié par L'Osservatore Romano. Cependant, l'opposition du magistère catholique romain au prolongement philosophique et social de la modernité, que représente dans la diversité de ses obédiences* la franc-maçonnerie, persiste de nos jours encore. En 1997, le cardinal Ratzinger a exposé quels dangers continue de faire courir au dogme de l'Église un vaste mouvement né des Lumières. Pour lui, la franc-maçonnerie, racine du relativisme, adhère pleinement,à ce vaste mouvement qui considère l'Église comme une institution désuète.

Le maintien du catholique franc-maçon en état de péché grave pose la question de la validité des sacrements qu'il est en droit, et surtout en conscience, de solliciter et de recevoir. Rendant illisibles les lois canoniques en vigueur depuis 1983, les positions du magistère obscurcissent la possibilité qu'ont les Églises particulières, locales, de dire le droit avec toute la sérénité qu'impose la pratique de l'équité juridique.

P. B.